Pour des raisons que je développerai certainement plus tard, j’ai décidé en cette fin 2021 de laisser un peu de côté les séries pour donne un peu plus de place aux films. Ce qui s’est logiquement vu depuis septembre.

Mais évidemment, je ne pouvais pas simplement regarder des films. Alors j’ai profité de l’actualité et la sortie de No Time to Die (2021) pour me lancer un défi : regarder tous les James Bond dans leur ordre de sortie en salle, en commençant donc par Dr. No (1962).

Cela représente donc 25 films puisque je me suis focalisé sur les films EON. Mes retours détaillés sont disponibles dans JDMAI #70 (octobre 2021) et JDMAI #71 (novembre 2021).

L’objectif étant atteint, c’est l’heure d’un petit bilan.

Jusqu’alors, James Bond, ça me faisait penser à deux choses :

  • La première ce sont les vacances d’été que je passais, enfant, dans la Sud de la France chez ma tante; car son mari possédait l’intégralité des films (en VHS à l’époque) et donc non seulement on en regardait plusieurs chaque année, mais aussi, avec mon cousin, on se mettait naturellement à jouer aux espions en s’inventant différents gadgets.
  • La seconde c’est GoldenEye 007, le jeu sur Nintendo 64 auquel je jouais lorsque j’allais (très régulièrement) dans la salle de jeu d’un ami qui était équipé et avec lequel on se faisait des 1v1.

Si j’ai reconnu certains personnages, certains décors, certaines scènes, ça restait malgré tout flou dans ma mémoire. Et surtout, j’y ai vu des choses bien différentes de ce que j’ai pu voir initialement.

Les premiers films avec Sean Connery c’est limite insoutenable tellement le personnage est un incroyable beauf à chaque seconde, à chaque geste, à chaque regard… Jean Dujardin dans OSS 117 qui cherche à parodier cela est presque trop sobre au final.

Avec les changements d’acteurs et d’époque, cela s’améliore, petit à petit, même s’il faut attendre les années 2000 et Daniel Craig pour qu’on arrive à quelque chose de correct. On Her Majesty’s Secret Service fait figure d’exception mais j’y reviendrai.

Dans mes souvenirs, l’un des points forts de la franchise c’était la présence de nombreux gadgets, fournis par Q; que ce soit via des petits objets ou l’équipement du véhicule de service. Si c’est bien le cas, ça sonne malheureusement faux car les gadgets sont fournis au début et ensuite les actions de Bond font qu’il va, grand hasard, avoir besoin de ces gadgets pour se sortir de situations périlleuses. Un peu comme-ci Q venait du futur et fournissait à Bond les gadgets adaptés en sachant les épreuves qu’il aurait à traverser. Ou alors comme Franck Lepage qui improvise un discours en fonction des éléments de langage qui lui sont fournis… Et pour la voiture, si tout le monde pense Aston Martin quand on dit James Bond, logique puisque marque anglaise, on voit finalement apparaître la forte influence du placement de produit avec l’arrivée de BMW (hérésie, une marque allemande !) pour équiper l’espion dans plusieurs films (essentiellement ceux avec Pierce Brosnan si je ne m’abuse) ce qui semble absurde vis à vis de l’image so british que la franchise semble vouloir donner au personnage principal. Mais bon, après tout, il porte bien une Rolex dans la plupart des films (sauf quelque-fois une Omega).

A ce propos, le plus gros problème que j’ai avec ces films, c’est qu’en plus de ne pas avoir de morale; ici il n’est pas question du bien vs le mal, mais de nous (le MI6) voir moi (James Bond) vs eux; les valeurs qui sont promues sont vraiment pas terribles : le mâle quarantenaire qui porte des costumes de luxe, des montres de luxe, roule en voiture de luxe, boit des cocktails (cf titre) dans des hôtels de luxe et passe son temps à coucher avec des filles d’une vingtaine d’année. Un mode de vie individualiste qui sert surtout des intérêts commerciaux et… c’est tout.

Daniel Craig Aston Martin

Si cela se ressent moins dans les films les plus récents, les premiers semblent également avoir été réalisés pour promouvoir l’industrie touristique avec l’accent mis sur les destinations paradisiaques que fréquente l’agent secret. Et finalement, la franchise illustre parfaitement le romantisme décrit par Harari et on en vient à se demander si tous ces films ne sont pas que des publicités pour des industries très intéressés.

Romanticism tells us that in order to make the most of our human potential we must have as many different experiences as we can. We must open ourselves to a wide spectrum of emotions; we must sample various kinds of relationships; we must try different cuisines; we must learn to appreciate different styles of music. One of the best ways to do all that is to break free from our daily routine, leave behind our familiar setting, and go travelling in distant lands, where we can ’experience’ the culture, the smells, the tastes and the norms of other people. We hear again and again the romantic myths about ‘how a new experience opened my eyes and changed my life’. Consumerism tells us that in order to be happy we must consume as many products and services as possible. If we feel that something is missing or not quite right, then we probably need to buy a product (a car, new clothes, organic food) or a service (housekeeping, relationship therapy, yoga classes). Every television commercial is another little legend about how consuming some product or service will make life better. Romanticism, which encourages variety, meshes perfectly with consumerism. Their marriage has given birth to the infinite ‘market of experiences’, on which the modern tourism industry is founded.
[Yuval Noah Harari - Sapiens: A Brief History of Humankind]

Un autre fait marquant de la franchise, est la ressemblance flagrante entre les méchants (villain) de chaque film et un personnage très (trop) populaire aujourd’hui. Il doit une partie de sa fortune aux diamants, comme Blofeld dans Diamonds are Forever ou encore le Colonel Moon dans Die Another Day. Il a fait fortune dans les technologies et cherche à conquérir l’espace, comme Hugo Drax dans Moonraker. Il cherche à réinventer le monorail que l’on croise dans toutes les bases secrètes des méchants… Et je pourrai continuer longtemps mais ce serait lui donner une importance que je ne souhaite pas.

Une des particularité de ces films, c’est aussi le gros travail effectué sur le générique. Qui lui vaut généralement d’avoir une chanson écrite spécifiquement, et dont la sélection de l’interprète est à chaque fois un évènement, au même titre que celle de la Bond Girl. Et visuellement c’est très recherché également. Mais je n’ai jamais réussi à accrocher. Que ce soit les anciens où l’accent était mis sur les corps quasi-dénudés de femmes, ou les plus récents où l’on s’amuse avec la forme des objets associés à l’intrigue et qui fournit des indices. Ouais, non, c’est chiant en fait.

Dans les points positifs, je retiendrai l’attachement du personnage au train. Si dans les premiers films ça pouvait sembler logique de le voir voyager en train couchette à travers l’Europe, aujourd’hui c’est plus compliqué. Et pourtant, on le voit régulièrement prendre le train, toujours en Europe mais également parfois en Asie ou en Afrique. Car dans quel autre moyen de transport peut-on dîner à une table, dormir dans un lit et… se battre avec une certaine aisance ?

Petite anecdote personnelle à propos des films, qui commencent tous par la gun barrel sequence. Ce n’est que très tardivement, avec Casino Royale où l’on voit l’effet de rotation des stries, que j’ai compris de quoi il s’agissait réellement. Car jusqu’alors j’y avais toujours vu une sorte de tête de créature étrange dont je ne comprenais absolument pas le sens.

Jambes Bond Gun Barrel My stupid brain
James Bond Gun Barrel My stupid brain

Pour finir, je dirai que c’était une expérience intéressante qui m’a permis de me rafraîchir la mémoire et de pouvoir me faire un réel avis sur une franchise très populaire chez toutes les générations. Non seulement j’ai pu voir que finalement c’était vraiment pas si terrible, mais surtout qu’après avoir beaucoup progressé, elle repart dans le mauvais sens; en particulier avec le dernier, No Time to Die, qui s’avère être une véritable catastrophe tant il se détache de l’esprit de la série et qu’il est mauvais en tant que simple film.

Je ne vais pas me lancer dans un classement, tâche trop complexe et sans intérêt, mais si je devais n’en retenir qu’un (en fait trois), ce serait (dans l’ordre de sortie) :

  • On Her Majesty’s Secret Service (1969) : Seul film avec George Lazenby, le plus réaliste et humain, avec en bonus cet aspect amateur dans les cascades et les effets spéciaux qui s’avère plaisant.
  • The Living Daylights (1987) : L’esprit Bond le plus abouti avec l’intrigue, les personnages, l’ambiance…
  • Quantum of Solace (2008) : Le Bond moderne le plus réussi, une bonne intrigue, de l’action au top appuyée sur des effets spéciaux maîtrisés, un vrai divertissement plaisant.