Avertissement : En tant que passionné du Tour de France, il est fort probable que j’émette un avis biaisé sur la question.
Au cours du Tour de France 2021, des captures d’écran des trajectoires des avions relais sont apparues sur les réseaux sociaux et ont relancé le débat sur l’impact écologique de cette course cycliste.
Effectivement, quiconque ayant déjà suivi le Giro ou la Vuelta sait à quel point la retransmission peut devenir très instable, en particulier en montagne, si le dispositif n’est pas à la hauteur. Résultat, pour la plus grande course du monde, les moyens sont mis afin d’assurer une expérience de qualité aux téléspectateurs. Et ça implique un certain nombre de camions, de voitures, de motos, d’hélicoptères et d’avions.
Parce que lorsque utilisé pour se déplacer au quotidien, en remplacement d’une automobile, le vélo est vu comme un moyen de transport vertueux, certains individus semblent avoir décidé qu’il devait en être de même pour la pratique sportive, qui plus est professionnelle, de la petite reine. Et voir un peloton de 200 coureurs entouré de centaines d’engins motorisés leur semble être une incroyable absurdité.
Mais est-ce un raisonnement sensé ? Cela me semble être le signe d’une grande ignorance du sujet. De la même manière qu’un vélo de course route utilisé pour participer au Tour de France n’a strictement rien à voir avec un V’Lille, l’usage qui en est fait est totalement différent.
Et surtout, cela fait-il pour autant du Tour de France un évènement polluant ?
De manière absolue, oui. Selon une étude de 2013, il est question de 341 000 tonnes eqCO2 pour les trois semaines que dure la compétition.
Non négligeable.
Mais le Tour de France, c’est un spectacle, un divertissement. Les coureurs, encadrants, journalistes, pilotes et chauffeurs ne sont pas là pour leur plaisir. Ils bossent.
Si on prend les chiffres de cette année, la course a rassemblé 150 millions de téléspectateurs en Europe.
Ramenons donc le bilan à ces personnes qui ont profité de cet évènement. Ce qui nous amène à 2.3 kg eqCO2 par téléspectateur. Et en faisant cela, on ne prend pas en compte les spectateurs sur le bord de la route, qui sont pourtant inclus dans le bilan de l’étude de 2013. Qui seraient environ 10 millions. Et ça ne prend pas en compte les téléspectateurs dans le reste du monde. Là, on arriverait à 3.5 milliards de paires d’yeux; ou 0.01 kg eqCO2 par téléspectateur.
Autant dire que ça apparaît tout de suite ridicule. La 208, voiture la plus vendue de 2020 en France, émet environ 100g/km de CO2. C’est-à-dire que le bilan carbone du Tour de France est équivalent à 23 ou… 1km parcourus en 208 par spectateur.
C’est pour cela qu’il m’apparaît que s’arrêter sur la valeur absolue est une erreur. Oui, l’avion ça pollue. Mais ici il ne s’agit pas de faire voler un avion pour emmener un couple faire bronzette quelques jours sur une île tropicale, chose qui ne profite qu’à eux; mais bien de partager du divertissement à des millions d’individus.
Pour autant, ce n’est pas une raison pour laisser les choses en l’état. En particulier concernant la caravane qui balance des tonnes de goodies, gadgets jetables majoritairement sans intérêt et de très faible qualité. Mais le soucis est que le cyclisme, comme la majorité des sports professionnels, n’est qu’une vitrine pour les marques. Les sponsors acceptent de mettre de l’argent car ils peuvent accéder très simplement à des millions de clients potentiels. Sans caravane, il est probable qu’il y aurait beaucoup moins de monde au bord des routes. Et c’est la même chose pour les médias, qui paient des droits de diffusions afin d’attirer des spectateurs pour… leur diffuser de la pub; à la radio, à la télé ou dans les journaux.
Compliqué donc. Mais pour autant je ne pense pas que fondamentalement le Tour soit un réel problème écologique et qu’il devrait montrer l’exemple, sous prétexte que le vélo c’est écolo.