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Mort au rat

Lorsque je circule à vélo dans la campagne, je croise beaucoup d’animaux écrasés sur la route ou au bord : rongeurs, hérissons, oiseaux, chats… en me doutant de l’identité de l’assassin (des cages en métal) mais en me demandant systématiquement si c’était un acte volontaire ou non. Ou tout du moins si la personne derrière le volant avait vu l’animal et avait essayé de l’éviter.

Et puis mercredi, en traversant Lille, à vélo toujours, je voyais surgir sur la route, 50m devant mois, un rat bien décidé à la traverser.
A peine le temps de réaliser la présence de ce rongeur que l’automobile qui me précédait venait à sa rencontre. L’animal disparaît sous la roue avant droite, est projeté sous le bas de caisse, rebondit, atterrit sur la route avant de passer sous la roue arrière droite de la voiture puis de rester figé, les quatre pattes en l’air, pendant que le véhicule blanc s’éloigne, comme-ci de rien n’était.

Tout s’est finalement passé extrêmement vite et le sort du rat était réglé aussi rapidement qu’il était apparu sur la route.

Dans la situation présente, au moins, j’ai la réponse. L’automobiliste n’a pas cherché à éviter d’écraser le rat. Mais compte tenu de la position du véhicule lorsque l’animal s’est inséré sur la route, et la configuration des lieux, je n’ai aucun doute qu’il n’est pas entré dans le champ de vision de l’automobiliste. Et que la rencontre entre la voiture et le rat est passée totalement inaperçue aux sens du conducteur. Tout au plus une sensation similaire à un minuscule trou dans la chaussée.

La conclusion dans tout ça ? Aucune. A part que cela se passe très rapidement et qu’il n’y a absolument rien à faire face à cela. Seuls des aménagements qui permettent de prévenir ce genre de rencontre impromptue pourrait éviter de retrouver des animaux écrasés sur la route. Mais quand on voit que l’on ne fait déjà pas cela pour protéger piétons et cyclistes, alors c’est cause perdue pour les autres animaux.

Bref, j’ai vu un rat se faire écraser en me rendant au travail et ça m’a fait réfléchir.

Passez un agréable mois d’août quand même.

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Cocasse

Ce jeudi 12 juillet 2022, lors de la 10ème étape du Tour de France, entre Morzine et Megève, des militants de Dernière Rénovation se sont installés en travers de la route, afin d’attirer l’attention du public mais surtout des dirigeants politiques sur la nécessité de rénover les bâtiments du pays afin de réduire notre consommation énergétique et, par là même, nos émissions et notre participation au dérèglement climatique.

Comme souvent face à ce genre d’action, bon nombre d’activistes de la télécommande ou du clavier se sont énervés, car c’est quand même malheureux que l’avenir de l’humanité vienne interrompre une course cycliste. Les priorités bordel !
La vérité est qu’on s’en cogne de ces personnes. Il y aura toujours quelqu’un pour se plaindre, quoi qu’il arrive, peu importe la raison. Et puis c’est dans leur nature. Ils n’existent que par leur capacité à contredire les autres.

Par contre ce qu’il était intéressant de voir c’étaient ceux qui s’étonnaient (j’ai pris le premier commentaire en ce sens; j’en ai lu des dizaines sur autant de plateformes; et d’ailleurs lui il a oublié ce qu’il s’est passé quelques jours plus tôt à Silverstone) que le Tour de France soit visé par des militants écologistes alors que, d’après eux, le vélo, et donc le Tour de France, sont écologiques par nature.
Premièrement, non, le Tour de France n’a rien d’écologique; j’en parlais l’an dernier.
Mais surtout, l’objectif de ces activistes étant d’attirer l’attention, cela semble donc tout à fait logique de profiter de la couverture de l’évènement sportif le plus médiatisé de l’été.
Peu importe si son organisateur pratique le greenwashing ou non.
On s’en branle. Le sujet est bien plus sérieux qu’une course de vélos.

Finalement, c’est quelques jours plus tard, ce samedi 17 juillet 2022, que l’on apprend que face aux fortes chaleurs, l’organisation du Tour de France procède à un arrosage des routes, via de l’eau transportée dans des camions, pour les refroidir et éviter les dangers provoqués par un bitume transpirant.
Petites précisions nécessaires :

  • 10 000 litres d’eau c’est pas grand chose (environ 200 douches ou moins d’un kg de bœuf)
  • le problème c’est qu’elle est pompée et transportée par des camions dans des lieux difficiles d’accès et qui nécessitent donc une grosse consommation de carburant
  • l’article est écrit avec le cul (c’est du RMC) mais 10 000 litres ne représente que la capacité d’un seul camion alors que comme on peut le lire à la fin, ASO possède plusieurs de ces camions
  • contrairement à ce qu’indique l’article, en tout cas à vélo, le problème du bitume surchauffé n’est pas qu’il colle mais qu’il devient glissant
  • on notera le mépris final concernant les sales écolos qui devraient bondir à l’idée d’un tel gaspillage alors qu’encore une fois c’est un problème qui nous concerne et nous concernera tous, même les journalistes servant le capital dans leurs bureaux climatisés

Bref, comme d’hab, une histoire de Lune, de doigt, de vérité qui dérange et de mur qui s’approche pendant qu’on se chamaille pour choisir la station radio qu’on préfère.

EDIT 15h : Pour ceux qui se demanderaient à quoi ça ressemble l’arrosage d’une route pour la garder fraîche (non), voir sur Twitter.

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JDMAI #78

Right Behind Her – Melinda Leigh : Grosse impression de facilité côté scénario. Des scènes complètes qui sont quasi-identiques à celles des tomes précédents. Mais bon, ça se lit tellement vite après tout…

She knew better than anyone that just because someone was family, that didn’t mean they weren’t toxic.
[Right Behind Her – Melinda Leigh]

We Own This City (Saison 1) : Énorme déception ! David Simon de retour à Baltimore, j’y croyais. Je voyais beaucoup de retours très positifs, j’y croyais. Mais rapidement on comprend que ça ne va pas le faire. Résumé grossièrement, c’est un mélange entre The Shield sans l’énergie qui faisait tout son intérêt, et The Wire sans la subtilité, la profondeur et l’exhaustivité qui faisaient tout son intérêt.
La réalisation et la narration rendent l’expérience très compliquée à comprendre, avec des sauts réguliers dans le temps très mal mis en œuvre, parfois avec une date clairement affichée, parfois via un bref passage par un supposé logiciel de saisie de temps en accéléré, certes une date apparaît mais c’est tellement mal fait et rapide que ça ne marche pas. Qui a eu cette terrible idée ?!
C’est vraiment beaucoup trop haché pour être fluide.
Une partie des personnages n’est absolument pas crédible, et comme ils sont interprétés par des acteurs de talent déjà croisés par ailleurs, là aussi ça vient certainement de la réalisation.
La série n’est même pas à la hauteur de son titre. Si dans The Wire la ville était un acteur à part entière et qu’elle était bien couverte en totalité, ici il n’est question que d’armes et de drogue. Alors à moins de considérer que Baltimore ce résume à ces deux activités, sinon ça ne tient pas.
En se focalisant majoritairement sur la police, forcément ça manque d’éléments pour bien cerner le problème et ça pourrait sembler être à charge contre les forces de l’ordre, ce que ça n’est pas. C’est uniquement à propos d’un groupe de policiers corrompus. Considérer que la série est anti-flics ce serait admettre que tous les policiers sont corrompus et font un usage systématiquement excessif de la violence. You do you.
Même la façon dont c’est filmé, dont c’est mis en musique, ça ne marche pas.
Dommage.
Heureusement ce ne sont que 6h épisodes d’une heure et qu’il n’est pas prévue de suite.

Ricky Gervais: SuperNature : Le spectacle dans son ensemble n’est pas particulièrement génial. C’est du Gervais et c’est drôle. Mais ce qui importe c’est la façon dont il arrive à mettre les mots sur l’état de la société, son impact sur l’humour et rappeler ce qu’est, à la base, l’humour. C’est tellement simple et pourtant nécessaire.

The Twyford Code – Janice Hallett : Déjà je dois dire que j’ai adoré l’idée du format. La transcription speech-to-text de 200 notes audio prises sur un iPhone, qui permet non seulement de masquer une partie cruciale de l’intrigue comme on le découvre à la fin, mais surtout qui ajoute énormément d’humour grâce aux erreurs d’interprétation du logiciel de reconnaissance audio, bien mal aidé par le vocabulaire et l’accent particulier du principal protagoniste. Ainsi iOS devient eye oh S ou UCL devient you see Elle. Résultat parfois c’est assez compliqué à comprendre, surtout que l’ensemble est volontairement très incohérent, mais tout fait partie de l’intrigue et du caractère particulier du livre.
Le dernier chapitre offre finalement des explications sur tout ce qu’il vient de se passer et c’est la grande révélation !
L’ensemble est vraiment très bien, sur le fond tout comme déjà indiqué, la forme.
Seule petite déception, la conclusion ouverte. Je n’aime vraiment pas ce genre de pratique, même si je comprends tout à fait son attrait pour les auteurs, puisqu’en une seule ligne on peut complètement retourner l’histoire et la tête des lecteurs.

A lot of talk inside about feelings. How feelings are like visitors with something to give you. If they knock on your door: answer. Let em in. Accept the gift. Say cheers, mate. Otherwise, they said, the feeling will go away and you won’t get the gift. I disagree. If a feeling knocks and no one answers, it’ll get p[EXPLICIT]d off. It’ll kick the door in, chuck the gift at you and smash your best ornaments so you don’t disrespect it again. You’ll be clearing up a lot more mess than you had to start with. So it’s good, Maxine, to cry if you want. Remember that.
[The Twyford Code – Janice Hallett]

Station Eleven (Saison 1, Épisodes 1/2/3/4) : Le premier épisode était extrêmement prometteur. Une ambiance particulière, des personnages étonnants, pas mal d’humour, un suspense croissant… Mais la suite n’est qu’un agrégat de névroses d’artistes dans un contexte d’apocalypse sanitaire qui paraît peu crédible depuis 2020 qui se déroule avec une lenteur insoutenable. Le seul point positif, c’est que cette fois ils ont enfin eu la bonne idée d’abandonner leurs voitures… ou presque, puisqu’elles sont tractées par des chevaux, en l’absence de carburant fossile. Mais les électriques continuent, elles, de circuler sans problème, 20 ans après l’effondrement…

To the monsters we’re the monsters
[Station Eleven]

Surrogates : L’idée de départ est intéressante mais ça s’arrête là. C’est totalement bâclé, très désagréable visuellement… Heureusement ça ne dure que 90 minutes. Et puis sérieusement, les gens vivent à travers un robot qu’ils contrôlent à distance mais ils continuent à utiliser des voitures pour déplacer leurs robots et des téléphones mobiles pour communiquer ?!

A History of Violence : Techniquement c’est plutôt très propre, l’image, le son, le casting… Mais l’histoire en soit n’est pas folichonne et ça semble bâclé. Surtout que cette ambiance à la Fargo laissait présager énormément !

Kids : Je vois l’idée, je reconnais le réalisme cru de la chose, mais je sais pas, ça manque quand même de fond, non ?! Peut-être une question de génération et/ou de période à laquelle j’ai regardé chacune des créations, mais j’avais bien plus adhéré à Skins qui était moins gratuit.

Coup de tête : Un film qui sent fort une France que je suis ravi de ne pas avoir connu, car si elle a produit de nombreuses œuvres majeures, c’est surtout là que s’est joué notre avenir, pour le pire. Mais en dehors de ça, c’est une comédie simple et bien rythmée, superbement mise en musique par Pierre Bachelet.

Jeff Ross Roasts Criminals: Live at Brazos County Jail : Le roast c’est rigolo quand c’est à petites doses, dans un contexte plus large. Là, en faire un special de 50 minutes, c’est vite chiant. Surtout quand c’est prétendument à vocation humaniste alors qu’en dehors de 2/3 punchlines bien fades (dire que la nourriture en prison est mauvaise, c’est pour le moins audacieux) il n’y a rien de très engagé.

Les valseuses : Pour avoir entendu de très nombreuses répliques, et pour avoir identifié un semblant de profil type de fan du film; je n’avais pas de grands espoirs, mais j’espérais au moins rigoler. C’est loupé.
Pour le classer en tant que comédie, il faut avoir un humour qui tourne autour du trou de balle, avoir un faible pour le softporn et apprécier les répliques de beaufs, vulgaires et aussi vides que le cinquième verre que vient de descendre leur auteur.
Sinon c’est simplement un drame où chaque personnage, principal, secondaire ou de passage, est plus malheureux que le précédent, et bien décidé à s’en prendre aux autres pour tenter, via un nivèlement par le bas, de donner un sens à sa vie.

1984 – Georges Orwell : De plus en plus de personnes prétendant que l’on vit actuellement dans une société telle que décrite dans le livre, je me suis dit qu’il était temps de le lire. Évidemment, ce n’est pas le cas. Certes, il est possible de dresser des parallèles, de constater des similitudes, mais fond n’y est pas. Et c’est d’ailleurs ce que je reproche à l’ouvrage; d’avoir voulu trop aller dans l’intellectuel et le romantisme, au point de perdre toute crédibilité. Les deux premières parties, celles auxquelles la majorité des personnes se réfèrent, sont concrètes et réalistes. Mais la dernière partie, qui révèle finalement le fondement de l’histoire, elle, est mise de côté car bien plus complexe et, finalement, irréaliste. Ce serait donner trop de crédit à l’espèce humaine.
Malgré tout c’est intéressant à lire, même si son message peut être interprété de manières totalement différentes puisque, comme l’indique l’auteur : the best books […] are those that tell you what you know already.

And even when they became discontented, as they sometimes did, their discontent led nowhere, because, being without general ideas, they could only focus it on petty specific grievances. The larger evils invariably escaped their notice.
[1984 – Georges Orwell]

L’amour, l’après-midi : Voilà un film qui me parle ! Pas nécessairement concernant le sujet central, mais plutôt vis à vis de l’existence générale de son personnage principal. Beaucoup de mal avec le jeu des acteurs cependant. Ça sonne faux. Mais la technique arrive à cacher un peu ce défaut.

The King : C’est long, c’est chiant, c’est pas très beau… Ah oui c’est du Netflix !

The Copenhagen Trilogy: Childhood / Youth / Dependency – Tove Ditlevsen : Totalement happé par la simplicité et l’authenticité du récit. Les deux premières parties sont malgré tout joyeuses, drôles et plaisantes à lire. La dernière est un gros tournant tragique. Non seulement parce que le traducteur n’est pas le même (j’ai beaucoup de mal avec le style employé pour cette partie) mais surtout parce que le récit est… pesant. Il semblerait que ça ne soit que partiellement auto-biographique (ou partiellement fictionnalisé), mais c’est le genre de lecture qui marque réellement.

Otherwise my father has written a lot of my papers and gotten good grades from Miss Mathiassen. It didn’t misfire until he wrote an essay on America and ended it like this: ‘America has been called the land of freedom. Earlier it meant freedom to be yourself, to work, and to own land. Now it practically means freedom to starve to death if you don’t have money to buy food.’ ‘What in the world,’ said my classroom teacher, ‘do you mean by that nonsense?’
[The Copenhagen Trilogy: Childhood / Youth / Dependency – Tove Ditlevsen]

#Playlist

Les P’tits Yeux – Chanson pour Renaud : Une vraie belle chanson hommage à Renaud (et ses chants). Belle, bien rythmée, sincère et pleine d’heureuse références. Sans chercher à copier. Les paroles sont disponibles sur Genius.